Sous les premiers rayons de l’astre du jour, le vieux Jake sortait comme à l'accoutumé tous les jours de son humble demeure pour se diriger vers la plage. En effet, le vieil homme était un pêcheur amateur, mais non moins chevronné. Profondément routinier, le vieux Jake était ancré dans ses habitudes. Dès l’aube, le passionné de pêche suivait une routine parfaitement préparée. Après un petit déjeuner frugal, il était temps de se diriger vers la plage où une petite embarcation de fortune l’attendait… Mais en arrivant à la page, Jake vit le corps d’un inconnu à la fleur de l'âge, affalé sur le sable et complètement trempé. Il ne fallut pas longtemps au vieil homme pour comprendre que cela ne pouvait être qu'un naufragé. En s’approchant du corps, Jake, qui avait servi autrefois dans la marine, eut le réflexe de peser la respiration de l'inconscient.  Elle semblait saccadée, mais au moins il n’avait pas retrouvé un cadavre. La journée de pêche annulée,  le vieillard emmena le naufragé chez lui afin de lui administrer les premiers soins. Deux jours plus tard, le jeune homme finit enfin par s’éveiller.

_ Oh le cheunot a fini de pioncher hahaha…  Quel veinard, un peu et tu cherais devenu de la chair pour les achticots hahaha… Ch’est quoi ton p’tit nom monchieur  le roupilleur hein ?

S’évadant de ses cauchemars, le dormeur se trouva dans une petite cabane faite d’un bois vétuste aux côtés d’un vieillard inconnu et à la bouche bien dégarnie d’après ce qu’il venait d’entendre.  Il avait besoin de reprendre ses idées, mais une migraine épouvantable rendait l’exercice plus ardu. La question du vieux type n’arrangeait pas les choses. Quant au vieillard, il commença à se demander s’il n’était  pas tombé sur un amnésique.  Mais le jeune homme prit finalement la parole, non sans hésitation.

_ Je…Je m’appelle… heu… Rrroy… Marshall… Merci de m’avoir sauvé. Le navire de transport où je me trouvais a été pris en chasse par des pirates, je remercie la fortune d’avoir survécu à leur assaut.  

En fait, tout ce que venait de dire le naufragé n’était qu’un ramassis de mensonges. Il ne s’appelait pas Roy Marshall, et le navire où il se trouvait ne fut pas attaqué par des pirates. Tout cela est bien mystérieux, vous me direz ? Si oui, alors vous avez à faire à un bien joyeux narrateur qui a toujours rêvé de  créer du mystère dans ses récits. Sinon, bah tant pis… On fera mieux la prochaine fois. Pour en revenir à l’histoire principale, voici la réponse à toutes vos questions.



Pour tout bon criminel qui se doit, l’île de Golto peut se comparer facilement à un centre de loisirs trois étoiles où il fait bon d’y vivre. Un véritable paradis sur terre, où la marine et le gouvernement mondial sont considérés comme persona non grata. Par contre,  pour la plupart des habitants qui vivaient dans les rues sombres de Golto, c’était l’enfer. Le naufragé connaissait bien cet enfer, car il avait grandi au milieu des gangs et des criminels. Son vrai prénom était Justin, Justin Hart. Ce dernier n'éprouva pas le bonheur de profiter de sa génitrice, celle-ci avait péri en donnant naissance à son enfant. Quant à son père, son unique famille. C’était un ivrogne accro au jeu considéré par tout le monde comme un raté. À l’âge de cinq ans, Justin pleurait très fréquemment. Son père qui le regardait souvent d’un air dédaigneux ne lui accordait guère d’affection. Il ne passait chez lui que pour dormir. Quand le garçonnet sortait de sa maison, les ruelles obscures emplies de gangsters qui faisaient la loi lui faisaient peur. Néanmoins, il pouvait toujours compter sur ses voisins. Un jour, alors que Joe le raté était occupé à siroter du rhum, aux côtés de quelques filles de joie, tout cela grâce à un détroussement qui lui avait rapporté gros. Justin attrapa une forte fièvre qui aurait pu être fatale si sa voisine Maria n’eut pas veillé sur lui toute la nuit. Et pourtant, étrangement, le garçon ne ressentait aucune animosité pour son père.

Quelques années plus tard, le jeune Justin avait gagné un peu de confiance en lui. Lorsqu’un villageois le perçait du regard, le petit garçon y faisait face avec un grand sourire bien provocateur. Il était désormais hors de question de demeurer triste, et il souhaitait vivre sa vie comme il en avait envie. Il passait énormément de temps chez sa voisine Maria. En effet, cette dernière avait un fils du même âge que Justin. Souvent, les deux gamins s'amusaient au pirate et au marine, et à chaque fois, le fils du raté jouait le marine. En fait, le Hart avait décidé de s'engager dans la marine, rêvant d'accéder un jour au grade d'amiral, afin de pouvoir débarrasser Golto des criminels qui appliquaient la loi du plus fort. De fil en aiguille, Maria était devenue comme une mère pour le jeune garçon. C’était une cuisinière hors pair et Justin était un gourmand hors catégorie. Pour cette raison, il voulut apprendre à faire la cuisine. Au début, Justin ne faisait qu’observer sa seconde maman avec admiration, mais petit à petit, il se mit à retenir les noms des ingrédients ainsi que leurs goûts. D’après Maria, savoir choisir de bons produits était une qualité indispensable pour un cuisinier. Finalement, Le Hart était en mesure de préparer quelques petits plats délicieux alors qu’il avait neuf ans. La relation du jeune garçon avec son père n’avait quant à elle toujours pas changé avec le temps. Le raté avait beau enchaîner les crasses à son fils, ce dernier faisait preuve d’une magnanimité rare. Mais cette indulgence allait bientôt atteindre ses limites.  

À l’âge de dix ans, Justin ne pensait qu’à une seule et unique chose, partir de Golto afin de s’engager dans la marine. Cette île le répugnait au plus profond de son âme, il n’arrivait pas à concevoir son avenir dans sa ville natale. Son seul regret, c’était l’idée de devoir un jour quitter son père, Maria ainsi que son meilleur ami Shaka. Tous les soirs, il s’imaginait être un soldat de la marine passant le plus clair de son temps en mer à chasser les pirates, ainsi que tous les criminels qui souillaient les mers. Il se voyait manier un sabre et mettant les méchants en prison. Dans l’esprit du jeune garçon, le monde était divisé en deux catégories, les gentils marines et les maléfiques pirates... Même à Golto, on pouvait être naïf… Ce qu’il ne savait pas, c’était que toutes les nuits, son raté de père jouait aux dés dans un établissement tenu par un gang. Et au fil du temps, il accumulait une dette importante qu’il ne pouvait rembourser. Dans ce genre d’endroit, il n’y avait que trois moyens de payer son dû, l’argent comptant, les objets de valeur et le dernier ainsi que le plus terrible, devenir esclave. Mais en plus d’être un raté, le père de Justin était un lâche.  Ce fut pour cette raison, qu’un soir, Joe entra chez lui, accompagné de deux types. Il ne fallait pas sortir de l’académie de la marine, pour comprendre que c’était des truands. D’un regard inexpressif, le joueur invétéré intima aux deux hommes de prendre son fils. Il échangea sa dette contre son fils unique…



Justin avait toujours rêvé de quitter Golto, mais jamais il n’avait imaginé le faire de la sorte. Les deux malfrats qui accompagnèrent son raté de père, s’élancèrent aussitôt sur le jeune garçon afin de lui attacher les mains. La victime avait beau s’agiter, mais face à la force de deux adultes, Justin ne put rien faire à part s’époumoner en priant qu’une personne vienne à la rescousse. En vain… Agacé par les cris du Hart, un des deux types lui flanquât une rouste qui lui fit perde connaissance. En se réveillant, le gamin se trouvait dans une cale d’un navire aux côtes d’autres esclaves. Éprouvant la sensation d’un métal froid sur ses chevilles, Justin vit ses jambes enchaînées. À cet instant, le garçon ne put empêcher ses larmes de tomber, maudissant son destin cruel.  Après quelques jours qui semblèrent des mois aux yeux du jeune servile, le navire mouilla à Saint Urea, l’un des plus grands royaumes des mers bleus. Le propriétaire actuel des esclaves dont faisait partie Justin, était venu à South Blue afin de vendre la marchandise à un notable esclavagiste du royaume. La transaction n’était pas légale à ce moment-là, mais l’acheteur allait pouvoir commercialiser les entravés en toute légalité. Justin avait compris tout cela grâce aux explications de l’un de ses congénères. Face à ces révélations, toute l’image que s’était faite le garçon sur le monde s’avéra complètement fausse. Le gouvernement mondial ainsi que la marine, jouaient un rôle primordial dans le marché de l’esclavage. Il ne put que maudire sa naïveté. Un moins plus tard, Justin ainsi qu’un grand nombre d’esclaves furent vendus à un Tenryuubito, un noble de la ville sainte de Marijoa appelé "Saint Regnard"…


[right]Marijoa, Red Line,[/right]
Après avoir été acheté par le noble mondial, Justin et ses congénères furent enfermés dans la cale du navire de leur maître qui se dirigeait désormais vers Marijoa, escorté par deux cuirassés de la marine.  La petite flotte avait traversé Calm Belt sans la moindre difficulté afin d’atteindre sa destination en un temps moindre. Arrivée dans la sainte ville, la marchandise fut transportée dans la résidence du maître, ou plutôt dans le sous-sol de la demeure. Lorsque tous les esclaves furent réunis, nouveaux venus et les habituels. Saint Regnard prit finalement la parole avec sourire carnassier.

_ Bienvenue, mes chers nouveaux guerriers !! Je commence par vous informer que vous allez tous passer chez le docteur pour une visite médicale en bonne et due forme. J’ai besoin de corps sains pour préparer ma fabuleuse attraction… Euh…Aussi, vous recevrez la marque… Ce n’est qu’une petite formalité bien sûr. Alors !!! Je vous ai acheté très cher pour la mise en place de mon grand et ambitieux projet !! Bah… Les serviteurs ne manquent pas… Mon projet d'envergure est de créer la distraction ultime!!! Une arène où des hommes se battent en risquant leurs vies !!!

Le dragon céleste enchaînait ses phrases comme l’aurait fait un religieux profondément pieux prêchant sa foi afin de convertir les pécheurs. Les bras grands ouverts, le noble semblait assoiffé par son ambition dévorante et par une conviction inébranlable en son projet. Cette arène était à ses yeux la parfaite solution à l’ennui caractéristique aux personnes de son rang. En baissant son regard sur les esclaves, il ne put retenir un soupir face à leur manque flagrant d’enthousiasme… Après tout, ce n’était que des roturiers… Que pouvaient-ils comprendre des véritables plaisirs. Rien certainement. Il s’adressa à ses serviteurs une seconde fois.

_ Comme vous ne semblez pas saisir le sens de tout cela, passons au plus important. Je vous présente vos cinq entraîneurs, ils m’ont coûté le prix fort, mais au moins, vous n’entrerez pas à l’arène sans un entraînement préalable. Cela sera sûrement plus utile aux plus jeunes, qui bénéficieront de suffisamment de temps pour devenir très forts. Ah ! Autre chose qui, j’en suis sûr, vous motivera.  Remportez cinquante tournois et vous serez libre !!!

De tout ce qu’avait dit le maître, Justin ne retint qu’une seule chose. Il était toujours possible d’être libre. Il devait pour cela devenir le plus fort possible afin d’atteindre son objectif. Parmi les cinq entraîneurs, il y avait un maître du combat au corps à corps. Il décida de suivre son enseignement… Après huit années d’apprentissage, Justin avait désormais dix-huit ans. C’était devenu un jeune homme au regard glacial. En plus d’avoir appris le maniement du sabre, l’esclave à la chevelure blanche s’était habitué à la hiérarchie qui régnait dans les sous-sols de la résidence de Saint Regnard. Organisée avec un système pyramidal, le maître régnait sur tous les enchaînés. Au-dessous se trouvaient les " gardes-chiourme ". Les esclaves les surnommaient ainsi, car ils assumaient la charge de surveiller la marchandise ou de se déplacer avec le maître lors qu’il allait se fournir de nouveau.  Les gardes-chiourme demeuraient hais par les entravés, car c’étaient des esclaves qui s’étaient portés volontaires. Le dragon céleste était suffisamment sadique au point de faire surveiller des esclaves par d'autres serviles. En dehors de l’arène et des divers entraînements, Justin passait beaucoup de temps sous les ordres du chef, l’homme qui préparait les repas pour les esclaves. Conscient de l’importance d’une bonne alimentation sur la forme des combattants, Saint Regnard acheta un jour un coq au service d’un équipage de pirates qui avait été arrêté non loin du royaume de Goa.  Le Hart l’assistait souvent dans la préparation des repas. A vrai dire, la cuisine était la seule activité qui le consolait de son malheureux destin. Le jeune servile était devenu un cuisinier émérite.

Quant à l’arène, la représentation de l’enfer sur terre. Golto apparaissait aux yeux de Justin comme une station thermale à côté de l’attraction du Tenryuubito. Tous les spectateurs recevaient des armes en entrant dans l’arène. Une invention oh combien cruelle du maître. Les nobles qui assistaient au spectacle avaient le droit d’éliminer des combattants si ces derniers ne les avaient pas divertis. Quant à l’attraction, ce n’était pas que des duels. Il y avait deux autres types de divertissement. Le premier consistait à faire entourer des esclaves par des bêtes sauvages, l’objectif était de survivre. Il y avait également la battle royal, un classique comme disait le maître du spectacle qui adorait jouer aux commentateurs. Mais l’attraction la plus appréciée des spectateurs, était de loin la bataille navale, où certains devaient interpréter des pirates et d’autres des marines. Mais c’était toujours les pirates qui étaient exécutés. Justin avait réussi à survivre à quelques arènes, il en avait même gagné deux. Mais il comprit très vite que sa fin était proche s’il continuait à participer. Mais un événement changea les choses. Alors que les affaires de Saint Regnard allaient plutôt bien, l’assaut de Marineford par le seigneur des pirates fit trembler  Marijoa. Bien que la sécurité a été renforcée, le spectre d’une attaque de Samael D. Cosa planes sur les dragons célestes. Les jeux du maître furent suspendus, donnant du répit à Justin ainsi qu’aux autres esclaves. Mais presque trois années après l’attaque de la base de la marine. Alors que le maître de l’arène se rendait avec ses poulins à South Blue pour organiser son spectacle à Saint Urea, une cellule de la révolution pris d’assaut le navire du noble mondial. Profitant de chaos engendré par l’abordage, Justin réussit à récupérer les clés de ses fers et sauta par dessus bord en espérant un avenir meilleur.


_ Oh le cheunot a fini de pioncher hahaha…  Quel veinard, un peu et tu cherais devenu de la chair pour les achticots hahaha… Ch’est quoi ton p’tit nom monchieur  le roupilleur hein ?

À cette question, tous les souvenirs remontèrent à la surface. Justin était un marron désormais, il ne pouvait donner son nom aussi facilement. Mais ce ne fut pas la raison qui le conduit à donner un faux nom. Il ne voulait plus porter le nom de son traître de père. Justin Hart périt le jour où Joe le raté avait vendu son père. Il s’appelait désormais Roy Marshall. Plusieurs mois plus tard, après s’être fait un nom en ayant attaqué quelques salles de vente d’esclave, et ayant battu à mort quelques canailles à Golto, dont faisait partie son père. Roy s’apprêtait à entrer dans Grand Line avec pour objectif d’entrer dans la légende, et de devenir l’homme le plus libre du monde. Sera-t-il en mesure d’accomplir son ambition ?